…UN DIEU SAUVEGUIDE ?…
Etape 14 / Dimanche 10 mai 2015 / Saint-Alban-sur-Limagnole
Si j’ai un peu forcé la longueur de mon étape d’hier, c’est que je savais que j’aurais droit aujourd’hui dimanche au repos dominical. Dans le mythe de la Création, c’est Dieu lui même qui a fondé cette coutume d’un jour de repos au septième jour. Le mot coutume n’est pas exact. Ce fut un commandement adressé aux Hébreux : le fameux jour du Sabbat ! Un jour pour récupérer, pour sauvegarder ses forces… Le Dieu des Hébreux se montra guide avisé, se gratifiant lui-même d’un tel repos au soir du 6ème jour de son élan créateur. Repris, mais décalé d’un jour par la tradition chrétienne, ce repos prit le nom de « jour du Seigneur », dies Dominicus en latin. Ce jour était déjà férié sous le 1er empereur chrétien Constantin, et sa désignation évolua pour devenir notre mot français dimanche.
Intéressante cette tradition d’un Dieu qui cherche à sauvegarder tes forces, et qui te guide à le faire tous les 7 jours par son propre exemple ! Quand les révolutionnaires ont voulu imposer un calendrier décimal en 1793, avec une semaine de 10 jours, le jour chômé ne venait que tous les décadis (tous les dixièmes jours), la résistance en milieu rural fut considérable. Ce fut une des raisons du retour au calendrier Grégorien en l’an XIII de la République.
Approfondissant cette notion d’un Dieu qui veillerait à ma sauvegarde et qui me guiderait, j’avoue qu’à maintes reprises dans ma vie je me suis senti escorté et protégé. Ce sentiment s’est confirmé surtout lorsque mes actions s’orientaient à essayer de faire du bien et quand des évènements extérieurs conspiraient à m’en empêcher : j’avais l’impression qu’une force extérieure m’inspirait la bonne méthode à prendre, le bon chemin à suivre.
Existe-t-il ailleurs que dans mon imagination, ce philanthrope d’en haut qui me facilite les moyens d’arriver à mes fins, quand celles-ci sont de bonne valeur, et qui m’aide à conjurer les obstacles qui se ne manquent pas alors de se présenter ? Un Dieu qui me propose des garde-fous lorsqu’il me guide par une étroite passerelle vers un versant plus baigné de lumière ? Dieu qui sauvegarde et guide … Osons le néologisme : Dieu sauveguide !
Allons bon, le doute me revient. Suis-je en train de vouloir inventer un nom à la simple projection intériorisée d’un désir de vouloir être accompagné ? Quelle est cette image d’un bienfaiteur divin, subtil et délicat dans le secours qu’il m’apporte à mieux réussir si je sors de moi-même et cherche à mieux faire ? Ne serait-ce qu’un fantôme dans mon inconscient ?
L’inconscient, c’est cet étrange réservoir où se sont accumulées des masses de décisions justes et fausses, l’expérience des générations antérieures. Ce réservoir ou s’est décanté l’essence de moi-même me donne de meilleurs réflexes quand je suis en situation inconnue. L’inconscient, on le découvre dans ce comportement inné que l’on prête aux animaux, celui qui donne à l’oisillon le réflexe d’ouvrir le bec à la première ombre qui se pose sur le nid. Celui qui donne à la petite mouette le réflexe de frapper le point rouge sur le bec qui s’approche, et qui donne à ses parents adultes le réflexe de dégurgiter leur nourriture.
Réel ou illusoire, ce Dieu « sauveguide » ? Objective ou subjective, cette image renforcée par des générations de lecteurs de la Bible ? Est-il raisonnable de croire en un Dieu capable d’entretenir une relation personnelle avec chaque individu ? Berger, ange gardien, c’est ainsi que l’on me le présentait dans ma jeunesse … Des fidèles de Darwin l’accusent de n’être que simple représentation anthropomorphique d’une évolution globale qui, ni moraliste, ni perfectionniste, ni juste, ni injuste, assure la survie de certaines espèces pour un temps donné. D’autres y voient un montage cérébral astucieux, concocté depuis des lustres pour amortir le choc de la réalité cruelle d’une nature privilégiant la loi du plus fort.
Tant pis, ce visage que j’imagine d’un Dieu « sauveguide » me plaît bien. Plus souriant que terrifiant, il évoque la dynamique universelle qui soutient et illumine pour un temps chaque forme d’existence. Je vais continuer à chercher à vérifier sa réalité structurante dans ma vie :
« D’état en flux, guidé, instrumenté, programmé, en devenir, structure un Dieu sauveguide ? »